vendredi 2 mars 2012

Joigny - Maison Sphère - 1973 - Daladier, Delekta

Joigny - Maison Sphère
Architectes: Jean Daladier, Henri Delekta et Joseph Nicolas.

Article tiré de "Connaissance des Arts" aout 1973
photos: Pascal Hinous, textes: Robert-Jean Vinson.

Cette sphère est construite dans une forêt de l'Yonne, véritable lieu d'expérimentation puisque la même équipe y a déjà réalisé, selon un procédé analogue, une maison composée de trois coupoles et s'apprête à en construire une autre dans une clairière voisine.
La structure est une ossature composée de nervures de béton selon le principe de la triangulation connu de longue date et dont les avantages par rapport aux principes traditionnels ne sont plus à démontrer : économie de matière, plus grande rapidité de mise en oeuvre, augmentation de la portée.
Ce dernier point est capital lorsque l'on recherche la « flexibilité » du cloisonnement, bien supérieure ici à celle qu'autorisé la construction en parallélépipèdes rectangles. Les surfaces courbes assurent à l'ensemble une résistance accrue. On comprend donc que la coupole et la sphère conviennent bien à ce mode de construction.


A l'intérieur, des tirants d'acier raidissent l'ossature. On peut aussi y prendre appui pour réaliser rapidement les planchers dont on a besoin. Ici, dans cette sphère de 16 m de diamètre, cent cinquante mètres carrés construits — quatre cent cinquante au maximum sont réalisables. Pour déterminer les volumes habitables, une grande salle de séjour, une salle à manger, un salon, trois chambres, plus salle de bains, cuisine et chaufferie, on a clos par des panneaux étanches, translucides ou transparents, les surfaces triangulaires entre nervures ou construit des murs de plancher à plancher. Trois niveaux différents existent. On a obtenu ainsi à l'intérieur de la sphère des volumes couverts qui en épousent la forme et des terrasses limitées par le jeu transparent des nervures.


La maison sphère telle qu'elle existe actuellement n'est qu'un état parmi des possibilités multiples. Ses créateurs n'ont pas voulu construire un bâtiment figé mais une organisation malléable. Cette logique de la structure, la malléabilité qu'elle autorise, auxquelles s'ajoute la normalisation très poussée des moyens de mise en oeuvre — les coffrages par exemple — sont des atouts appréciables: autant de facteurs capables d'abaisser sensiblement le prix d'une construction. Ces qualités techniques ne sont pourtant pas suffisantes. Cette sphère a d'autres arguments : son espace. Se loger est pour beaucoup un problème. L'espace est rare et si mesuré que le bon usage s'en est un peu perdu. On aménage des espaces habitables en fonction d'un équipement automatique qui, croiton, rendra la vie plus supportable: on se préoccupe d'économiser sur des surfaces, de calculer des cubages, des ventilations, des éclairements mais cherche-t-on vraiment à harmoniser des volumes, à accorder l'habitation à son environnement? En ville, la perception de l'espace intérieur est souvent très limitée, le ciel inexistant. Celui qui construit en est réduit à combler les interstices, à se raccorder à un contexte dont l'historicité, souvent, l'engage à l'anecdote.


En pleine nature, tout est différent. Les éléments naturels reprennent leur valeur. Le trajet journalier du soleil devient une réalité dont on perçoit la continuité : la direction du vent, le sens de la pluie, les changements de la végétation sont des faits si présents que par rapport à eux on doit se déterminer.

Là encore, la forme et la structure de cette sphère se justifient. D'une part, elle s'affirme une. Contre l'espace naturel, elle fait bloc.
Forme protectrice parmi les formes protectrices — on sait que la vie souvent choisit la sphère pour protéger ses germes. Elle fait partie du patrimoine des images sécurisantes instinctives. Placé à l'intérieur de celle-ci comment ne se sentirait-on pas protégé.


D'autre part, depuis l'intérieur, l'oeil a toujours présent la référence des nervures qui rythment, au gré de la lumière, l'espace interne et externe qui ne peuvent s'accorder sans cet intermédiaire tant leur échelle est différente.

Ces passages entre les espaces couverts des pièces, semi-couverts des terrasses, avec les couleurs et les valeurs de l'environnement naturel, sont traités avec une sensibilité remarquable qui donne à l'architecture de cette sphère une dimension musicale. Non seulement le soleil y tient sa partie (« piégé » tout au long de sa course, obligé à des moments choisis de passer à travers des points précis, de se réfléchir, de suivre des trajets préparés) mais la pluie est associée au concert. Cette paroi verticale brutale qui coupe la sphère est orientée plein ouest, face à la pluie, pour mieux la recevoir, pour mieux la percevoir.


Pour qu'en matière d'habitation le procédé se généralise, il est nécessaire qu'il reçoive un début d'industrialisation. Reste à savoir si sphères et coupoles peuvent s'imposer contre les formes traditionnelles. Après tout, leur tradition n'est pas si ancienne. L'espace des grottes de la préhistoire, les tentes nomades, les cases rondes de certaines tribus d'Afrique et d'Australie sont plus proches de l'espace sphérique que du volume rigide du cube ou du parallélépipède.

Une structure aussi souple, capable de proliférer, paraît d'autre part convenir à la cité spatiale évolutive dont rêvent les urbanistes. De tels prototypes qui mettent en avant la recherche des possibilités d'investir l'espace, d'utiliser les éléments naturels, de se situer par rapport à eux biologiquement et psychiquement, permettront à l'industrie de parfaire ses méthodes avec plus de chance d'être acceptée. En multipliant les tentatives de ce genre on pourra expérimenter des modèles et affirmer des principes.

Ceux qui sont en puissance dans cette sphère méritent d'être analysés à tous les niveaux. L'étude doit être féconde. Jean Daladier, Henri Deleckta et Joseph Nicolas travaillent sur deux points liés : — Utiliser des méthodes rapides pour multiplier les expériences — un grillage, par exemple, qu'ils pourraient tailler et modeler directement à l'échelle réelle, armature qu'ils enroberaient ensuite d'un béton étanche léger. Procédés peu onéreux qui donneront à la recherche architecturale le droit à l'erreur.

— Echapper par ce même procédé à l'abstraction exagérée des plans qui ne fait qu'empirer. Ils sont la cause d'expressions plastiques souvent sèches et surtout du manque de compréhension entre les projeteurs et les exécutants de plus en plus spécialisés et isolés. Le but : les réunir dans la réalité, à l'échelle vraie du chantier et les amener à rechercher ensemble la conception et la réalisation de tous les éléments nécessaires.
C'est en partant de la libre formulation de propositions dans l'espace que l'on a le plus de chance de progresser et non à l'inverse, comme trop souvent aujourd'hui, à partir des contraintes imposées abusivement, sinon supposées, par l'industrie. Robert-Jean Vinson

3 commentaires:

  1. MISE AU POINT: 1ère Page
    La récente multiplication de questions en provenance de medias et d'échos diffusés par les réseaux sociaux, probablement dus pour partie à la parution d'un remarquable ouvrage concernant la construction d'habitations dans les années 70, m'amènent à poser cette question:
    Une société, peut-elle s'attribuer les travaux originaux d'un salarié, au seul prétexte qu'elle le rétribue. A fortiori, lorsque les fonctions pour lesquelles il avait été engagé, sont sans rapport avec cette partie de son activité.
    Mais avant de donner les raisons de cette interrogation, je me dois de dire pourquoi. C'est la plus nécessaire des précautions oratoires.

    Jean DALADIER n'est pas le concepteur de ces constructions. Rien, tant dans sa formation que dans ses occupations antérieures à notre rencontre, ne lui permettait de revendiquer une quelconque expérience dans ce domaine. Toute action dans cette spécialité, s'est d'ailleurs éteinte après notre séparation, courant seconde moitié des années 70

    La situation prend effet dans la première moitié des années 60, peu de temps après son achat pour usage personnel de l'immeuble situé à l'angle du Quai de Montebello et du quai de la Tournelle dans ce quartier de Paris appelé " ILOT III ". La mise en état d'occupation nécessitant une intervention lourde, tant sur le plan technique qu'architectural, et la perspective d'une opération commerciale importante par le rachat des immeubles de ce quartier (Société Anonyme de Gestion Immobilière " SAGI ", dont son beau-père - André WEILL- est l'acteur principal), l'amènent à être à l'origine de la création de deux sociétés, dont la dénomination est suffisante pour définir leur destination:
    - la "SOMHACO" - Société pour la Modernisation de l'Habitat et de Construction
    Bureau Technique dont la vocation est l'étude des constructions à restaurer
    - la "SCRIA" - Société pour la Construction et la Restauration d'Immeubles Anciens
    Entreprise Générale dont la vocation est la concrétisation des Etudes de la SOMHACO
    Je suis engagé pour être le responsable du Bureau d'Etudes
    Joseph NICOLAS est engagé pour être le responsable de l'Entreprise

    Les opérations se déroulant sans difficultés majeures, Jean DALADIER envisage dans le courant de la seconde moitié des années 60, la diversification des activités en répondant à un concours de la Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier "CECA". Le thème visant pour l'essentiel, l'utilisation maximum des produits dérivés de la sidérurgie dans la construction d'habitations, était à l'évidence, fondamen-talement différent des occupations de la SOMHACO. La sanction par les résultats du concours l'a d'ailleurs immédiatement prouvé.

    Mais ceci m'a amené à lui proposer de concrétiser l'objet de la thèse que je développais déjà à l'époque et dont le sujet était, entre autres, l'utilisation des Solides Réguliers dans la Construction, principe qui visait à la standardisation des éléments constitutifs d'une structure.
    L'intérêt de cette approche qui était la préoccupation générale du moment, et les avantages fiscaux accordés dans le cadre de ces pros-pections, joints aux aides à la recherche qui en découlaient, l'ont incité à tenter l'expérience.

    RépondreSupprimer
  2. MISE AU POINT: 1ère Page
    La récente multiplication de questions en provenance de medias et d'échos diffusés par les réseaux sociaux, probablement dus pour partie à la parution d'un remarquable ouvrage concernant la construction d'habitations dans les années 70, m'amènent à poser cette question:
    Une société, peut-elle s'attribuer les travaux originaux d'un salarié, au seul prétexte qu'elle le rétribue. A fortiori, lorsque les fonctions pour lesquelles il avait été engagé, sont sans rapport avec cette partie de son activité.
    Mais avant de donner les raisons de cette interrogation, je me dois de dire pourquoi. C'est la plus nécessaire des précautions oratoires.

    Jean DALADIER n'est pas le concepteur de ces constructions. Rien, tant dans sa formation que dans ses occupations antérieures à notre rencontre, ne lui permettait de revendiquer une quelconque expérience dans ce domaine. Toute action dans cette spécialité, s'est d'ailleurs éteinte après notre séparation, courant seconde moitié des années 70

    La situation prend effet dans la première moitié des années 60, peu de temps après son achat pour usage personnel de l'immeuble situé à l'angle du Quai de Montebello et du quai de la Tournelle dans ce quartier de Paris appelé " ILOT III ". La mise en état d'occupation nécessitant une intervention lourde, tant sur le plan technique qu'architectural, et la perspective d'une opération commerciale importante par le rachat des immeubles de ce quartier (Société Anonyme de Gestion Immobilière " SAGI ", dont son beau-père - André WEILL- est l'acteur principal), l'amènent à être à l'origine de la création de deux sociétés, dont la dénomination est suffisante pour définir leur destination:
    - la "SOMHACO" - Société pour la Modernisation de l'Habitat et de Construction
    Bureau Technique dont la vocation est l'étude des constructions à restaurer
    - la "SCRIA" - Société pour la Construction et la Restauration d'Immeubles Anciens
    Entreprise Générale dont la vocation est la concrétisation des Etudes de la SOMHACO
    Je suis engagé pour être le responsable du Bureau d'Etudes
    Joseph NICOLAS est engagé pour être le responsable de l'Entreprise

    Les opérations se déroulant sans difficultés majeures, Jean DALADIER envisage dans le courant de la seconde moitié des années 60, la diversification des activités en répondant à un concours de la Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier "CECA". Le thème visant pour l'essentiel, l'utilisation maximum des produits dérivés de la sidérurgie dans la construction d'habitations, était à l'évidence, fondamen-talement différent des occupations de la SOMHACO. La sanction par les résultats du concours l'a d'ailleurs immédiatement prouvé.

    Mais ceci m'a amené à lui proposer de concrétiser l'objet de la thèse que je développais déjà à l'époque et dont le sujet était, entre autres, l'utilisation des Solides Réguliers dans la Construction, principe qui visait à la standardisation des éléments constitutifs d'une structure.
    L'intérêt de cette approche qui était la préoccupation générale du moment, et les avantages fiscaux accordés dans le cadre de ces pros-pections, joints aux aides à la recherche qui en découlaient, l'ont incité à tenter l'expérience.

    RépondreSupprimer
  3. MISE AU POINT: 2ème Page
    Il m'a donc donné carte blanche pour la mise en place de l'affaire, dans la stricte mesure où ce supplément d'activité soit sans conséquence sur mes charges courantes. Comme par ailleurs, cette élaboration était trop complexe donc trop onéreuse pour justifier la formation d'un assistant spécialisé, il m'a chargé d'assurer seul l'ensemble des actes nécessaires à la concrétisation.

    J'ai choisi, pour la matérialisation du projet, 3 modèles mathématiques différents qui ont conduit aux 3 constructions érigées sur la commune de Saint-Julien-du-Sault dans l'Yonne. Une 4ème a été érigée à POISSY dans le département des Yvelines. J'en ai établi les plans, tant architecturaux que techniques, et j'en ai assuré la direction de l'édification

    Que ceci soit souligné: aucun document, de quelque nature que ce soit n'a été élaboré par autre que moi. Ils ne figurent d'ailleurs nulle autre part que dans mes archives personnelles. De toute façon, nul dans l'entourage immédiat n'était en capacité de les exploiter, a fortiori de les créer.

    Je considère comme important de souligner ce qui suit: Il ne peut en aucun cas s'agir de "création spontanée".
    Ces structures sont issues d'êtres géométriquement purs, au même titre que le cube ou la sphère par exemple, mais évidemment beaucoup moins simples. Elles ne laissent aucune place à l'interprétation sentimentale.
    L'une d'entre elles par exemple (Trois Coupoles), est issue de l'interpénétration partielle de trois tronçons d'un Solide Archimédien appelé le "Rhombicosidodécaèdre" dont la nature, comme ceux de la même famille géométrique, est régie par le "Nombre d'Or". Leur manipulation exige une bonne maîtrise des lois de la géométrie avancée. La structure nue issue d'un de ces volumes, exposée au Musée de l'Art Moderne, magnifiquement soulignée par le peintre Jean DEGOTTEX en est la preuve évidente.
    A ceci s'ajoutent la fabrication qui s'appuie sur les règles rigoureuses de la stéréotomie, compliquées des critères de résistance globale, et le montage qui a nécessité la fabrication d'un outillage spécial dont je suis également l'auteur.

    Je remercie Jean DALADIER de m'avoir permis de m'exprimer dans ce domaine qui est celui de mes recherches personnelles. J'ai pu, grâce à lui, réaliser ces formes, tant sur le plan architectural que technique et en assurer la matérialisation sur chantier, à titre évidemment dépendant puisque j'étais salarié dans la société dont il était le gérant. Mais ma reconnaissance s'arrête là.
    Hormis ma position administrative en tant qu'employé, je revendique la totale propriété intellectuelle de ces ouvrages.

    Le silence que j'ai observé depuis ces créations est la preuve de mon peu d'empressement pour la publicité personnelle.
    En revanche, je refuse formellement l'appropriation de mes travaux par autrui.

    Je suis à la disposition de ceux que la situation intéresse
    Ils peuvent me joindre à : henri@delekta.com
    ou à partir du pavé GOOGLE : henri delekta

    RépondreSupprimer

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...