mercredi 9 mai 2012

Sebourg - Maison Verley / maison-plante - P. Székély

Sebourg - Maison Verley / maison-plante
Sculpteur: Pierre Szekely. Architecte: Henri Mouette
Construction: 1971-1972
Maison classée monument historique depuis 2002 (maison et terrain).


Texte: Pierre Joly, reportage photographique: Pierre Joly et Véra Cardot - L'Oeil - 1974.

















La maison se déploie librement sur un vaste terrain en pente, en lisiere d'un bois, aux limites d'un hameau voisin de la ville de Valenciennes. La chaussée en demi-cercle permet de quitter la route (un chemin vicinal) pour s’arrêter sous un abri. 

L'entrée ouvre sur une passerelle couverte, sorte de tunnel éclairé d'une large baie, comme un visage. Ce passage se divise, comme une tige porte des branches, pour donner accès à la « maison » des enfants (à gauche), vaste coquille abritant deux étages, où tiennent aisément cinq chambrettes. Chacune a son volume propre, sa propre baie vitrée donnant sur le jardin de plain-pied ou sur une terrasse à l'étage. 
































Au fond, on découvre de partout le volume massif de la salle de séjour dont jaillit la cheminée. Cette forme spectaculaire se reflète dans les vitrages des chambres. Si l'on revient à la vue d'ensemble, on aperçoit, au premier plan, un volume largement ouvert qui abrite un atelier et la chambre des parents. La salle de séjour ouvre sur le dehors par une large baie et se prolonge d'une piscine à ciel ouvert, qui assure la présence de l'eau, élément indispensable du paysage. 
































De la salle de séjour, dont le plan s'inscrit dans un cercle, la cheminée monumentale servant de centre et de pivot, on découvre tout alentour le paysage de prés et de bois, dont l'ampleur et la sérénité enveloppent la vie quotidienne des habitants. 
































Les meubles ont la même souplesse de formes, le même caractère informel que l'architecture. Un canapé « boudin » habillé de vinyl blanc, quelques « saccos » vêtus de cuir naturel suffisent à rendre la pièce confortable. Des sculptures anciennes de grande dimension ont trouvé là un espace à leur mesure: une vierge gothique, d'une rusticité monumentale, un torse romain hissé comme en triomphe sur un piétement d'acier. 

S'appuyant à la cheminée un escalier donne accès au couloir d'entrée et à une mezzanine, où l'on a aménagé un bureau-bibliothèque. Le soir, les vitrages en pan coupé répètent ces images familières, enveloppant le volume entier d'une féerie de reflets. 


































A l'intérieur du couloir d'entrée, le soleil découpe à travers le vitrage une image fantastique. La lumière organise l'espace, laissant deviner, au fond, le volume immense du séjour, en contrebas. Les chambres d'enfants sont traitées comme des alcôves, ouvrant à la fois sur le jardin et sur un vaste dégagement, éclairé de hublots, qui sert de salle de jeux. 
































Une Maison pas comme les autres 

Monsieur et Madame V. avaient acquis pour y bâtir un terrain bien situé dans un hameau, à quelques kilomètres de Valenciennes (Nord) où ils ont l'essentiel de leurs activités. Mais ils attendaient d'une maison autre chose que le confort ou cette sorte d'habitabilité que l'architecture moderne sait procurer, au prix parfois d'une machinerie contraignante. Aussi choisirent-ils pour maître d'oeuvre le sculpteur Pierre Székely, dont ils connaissaient et appréciaient les recherches architecturales, pour avoir habité plusieurs années auprès de l'église du Carmel de Valenciennes, dont il est l'auteur. La maison désormais achevée, habitée, la forme en peut surprendre: pas de mur, ni de toit, nulle part cet angle droit qui passe pour la norme et presque la règle morale de tout établissement humain. Les fenêtres s'arrondissent, comme pour mieux se conformer au champ de la vision. Le béton, projeté directement sur une armature mise en place au préalable, sans coffrage, épouse les contours les plus souples. La solidité de la construction est d'autant plus grande que la courbure des parois s'apparente à celle des formes d'égale résistance (isostatiques): la sphère, l’œuf, la goutte d'eau. L'épaisseur de ces parois peut alors être réduite au minimum: économie de matériaux et de main-d’œuvre qui fait le bon marché du procédé. Correctement appliquée, la technique se prête à toutes les audaces. Comme le dit très bien Pierre Székely: « Notre liberté rejoint celle des mollusques, qui protègent leurs mouvements par des parois. » Elle rejoint, en tout cas, l'ancienne liberté de l'architecture populaire, celle des cases et des abris, modelés plutôt que bâtis comme pour mieux se prêter aux gestes des hommes ou à leur imagination. 


































Pierre Székely insiste volontiers sur la rationalité de la disposition qu'il a choisie: le terrain étant en forte pente, la maison devait être placée en contrebas, pour s'éloigner et se protéger de l'agitation de la route. Mais dans un climat souvent maussade, il était bon de ménager un passage à couvert, pour conduire directement au coeur de l'habitation. Pour les mêmes raisons climatiques, le paysage devait être accessible du dedans, On devait pouvoir vivre au milieu de la nature, sans sortir de la maison, Székely justifie aisément la séparation qu'il a établie entre les différentes parties de la construction, traitée comme des volumes distincts, un peu à la manière dont d'autres préconisaient naguère la «séparation des fonctions». L'habitation lui apparaît, vieille image utopique, comme un village dont les maisons seraient reliées par des passages couverts. Il y voit, non sans raison, une très grande liberté de la vie familiale, liberté de se réunir ou de s'isoler, d'être ensemble ou chacun pour soi. Il lui arrive aussi de décrire la maison comme une plante. Elle a ses racines: «Le mouvement vient de la route, en contre-haut du terrain. Un «shunt» permet l'échange: la voiture s'arrête à l'abri, le piéton en descend pour pénétrer à l'intérieur par une tige qui s'élance dans le vide et se déploie en plusieurs branches, pour conduire aux habitations des parents et des enfants, aux chambres et aux ateliers. Au bout s'ouvre une grande fleur, ou fruit dans lequel on descend pour découvrir, au terme du cheminement, le paysage.» 
































Ainsi, par la voix du maître d’œuvre, la maison avoue volontiers la logique de son organisation. Elle dévoile plus malaisément son contenu imaginaire, pourtant évident. Ce sont là choses dont on ne peut parler qu'à demi-mot, tant la rigueur du discours rationaliste semble les avoir rejetées à l'arrière-fond de la conscience. Pierre Székely ne manque pas de remarquer, cependant, que la courbure des parois joue un rôle essentiel dans le sentiment que l'on prend tout d'abord de cette demeure. Les parois courbes protègent sans imposer de limite. «Comme dans les rêves, dit-il, elles reculent quand on avance. » Comme dans les rêves, la maison revêt des apparences de coquille ou de caverne qui ne laissent pas de doute sur le caractère maternel des images qu'elle entend évoquer. On dit: «l'intérieur» de quelqu'un pour parler de son appartement — ou de sa conscience... Si 'on prend au pied de la lettre ces images, comme Gaston Bachelard aimait à le faire, la forme architecturale perdra sans doute quelque chose de sa transparence, mais elle gagnera en profondeur et en signification. Les besoins sociaux que l'habitat est supposé satisfaire, avec tout ce qu'ils comportent, aujourd'hui, de superfétation et d'artifice, sous les apparences de la nécessité, s'effaceront pour laisser paraître au grand jour le désir primordial d'un abri. L'architecture deviendrait comme une psychanalyse de nos rêves, une mise en formes, justement, de notre vie intérieure. On pouvait penser qu'une maison si personnelle, si intime à ceux qui l'habitent, ne serait guère accueillante au visiteur. Il n'en est rien: le voyageur de passage s'y trouve bientôt de connivence. La maison ne se refuse pas à lui. Sans doute est-ce encore Bachelard qui nous livre la clé de ce mystère : « Dès que la vie se loge, se protège, se couvre, se cache, l'imagination sympathise avec l'être qui habite l'espace protégé. » 

lundi 7 mai 2012

Meudon - Résidence de l'Abbaye - J. Ginsberg, A. Bloc

Meudon - Résidence de l'Abbaye, rue des Capucins
Architectes: Jean Ginsberg, André Ilinski
Construction: 1958
Sculpture: André Bloc



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